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Photo du rédacteurMarie

Le rapport des 1000 premiers jours

Je vous propose ici mon retour et mes impressions sur le rapport rendu à Adrien Taquet, secrétaire d’état en charge de l’enfance et des familles, par la commission présidée par Boris Cyrulnik, le 9 septembre dernier.


J’ai pris le temps de le parcourir pour mieux vous le présenter.

Je ne vous cache pas que j’ai scruté en détail l’allaitement, la prématurité et le congé pour naissance mais j’ai également pris le temps de survoler tout le reste afin de m’en faire une impression globale.


Les puéricultrices ne sont malheureusement pas représentées au sein de la commission, ce qui est vraiment dommage à la vue de la spécificité de leur métier dans l’accompagnement de l’enfant et de sa famille.

Cependant, elles apparaissent bien en tant qu’infirmières spécialisées dans les différentes pages de ce rapport et cela me réjouit.

L’utilité de leur expertise est d’ailleurs soutenue par la recommandation de faire appel à des professionnels spécialisés, entre autres dans l’accueil de l’enfant.


Pour résumer le contenu de ce rapport, 5 grands axes ont été définis :


- 1. Obtenir un discours cohérent en clarifiant certaines bases essentielles : les interactions de l’enfant et ses besoins, les fondamentaux au niveau santé (sommeil, allaitement), la dépression périnatale, la violence éducative ordinaire, l’accueil de l’enfant…

- 2. L’accompagnement de la périnatalité et de la naissance : informer, écouter, rompre l’isolement, créer du lien interprofessionnels, l’accompagnement personnalisé, l’épuisement parental…

- 3. Répondre aux besoins des enfants spécifiques et fragilisés : prématurité, inclusion et dépistage, dépression postnatale, soutien du handicap, prise en charge de la précarité…

- 4. Les congés de naissance et les structures d’accueil : congé maternité, paternité, parental. Repenser au système d’accueil (formation, encadrement, qualité)

- 5. Recherche, évaluation des pratiques et formation des professionnels

Je tiens à préciser avant toute chose que je suis très heureuse d’avoir trouvé, entre autre, dans ce rapport les mots suivants :

Second parent

Allongement du congé paternité et parental

Prévention violence éducation ordinaire

Accompagnement personnalisé à domicile

Soutien à l’allaitement

Inclusion du handicap

Dépression postpartum

Attachement sécure

Prenons le temps de développer ce rapport en se penchant un peu plus sur les thèmes qui font partie de mon quotidien (tous me tiennent forcément à cœur puisqu’ils interviennent dans mes missions d’accompagnement de l’enfant et de sa famille comme les structures d’accueil, la précarité, l’inclusion du handicap, les violences ordinaires, la dépression postpartum mais je me sens moins spécialisée pour en parler).

1. Un discours cohérent


Les premières pages du rapport prennent le temps de repréciser les compétences et les besoins essentiels de l’enfant et plus précisément du bébé qui vient de naître afin de partir sur de bonnes bases et que chacun comprenne bien ce qui motive les propositions qui suivent…(p21-29)


On trouvera donc mention de la proximité physique, du contact peau à peau préconisé après la naissance (notamment pour les poids <2,5Kg), de la nécessité d’un attachement sécure, de l’existence de compétences sociales précoces de l’enfant permettant l’exploration et les apprentissages, de l’importance cruciale du langage dès la naissance, de la lecture dès que possible et du jeu qui débute dès les premières semaines de vie. Un aparté est fait concernant la place à laisser aux écrans, les risques et conséquences d’une utilisation non adaptée et la méfiance vis-à-vis des soi-disant contenus « éducatifs » non évalués réellement en ce sens. Au contraire, l’importance de la nature et de l’éveil culturel et artistique est mise en avant.


Tout de suite après sont précisés les fondamentaux pour un mode de vie sain et juste après un premier point concernant l’importance du sommeil (p31), se trouve l’allaitement maternel (p32-34)

Même si on souhaiterait toujours plus développer lorsqu’il s’agit d’allaitement, je suis très heureuse de le voir mentionner si rapidement et sur plusieurs pages.

Le rapport rappelle le taux extrêmement bas d’initiation de l’allaitement à 66,7% (le nombre de mamans qui commencent à la maternité, exclusif et mixte confondu) ainsi que sa durée très courte (en moyenne 105 jours mais qui tombe à 24 j si l’on ne regarde que les allaitements exclusifs !).

Lorsque l’on sait que la lactation s’installe correctement et que l’allaitement prend plus une vitesse de croisière au bout d’environ 1 mois en moyenne, on se rend compte avec ce dernier chiffre qu’il est souvent interrompu avant d’avoir vraiment commencé…

Le rapport reprécise les bénéfices scientifiquement démontrés d’un allaitement et les mesures nécessaires pour permettre son installation : soins individualisés, soutien lors du retour à la maison, information anténatale, respect du rythme du bébé et de sa physiologie propre, travail en réseau, collaboration nécessaire, groupe de soutien, formation commune pour les acteurs de la périnatalité, facilitation de l’allaitement sur les lieux de travail et lors de l’accueil en crèche.

La reconnaissance des dépressions périnatales (p36) est essentielle pour palier à leur sous-diagnostique et permettre une meilleure prise en charge, de même que les violences éducatives ordinaires (p38) dont le rapport précise, études à l’appui, l’impact sur le développement du bébé et du jeune enfant. Il en profite pour rappeler la loi du 11 juillet 2019 modifiant l’article 371-1 du code civil qui précise que « l’autorité parentale s’exerce sans violences physiques ou psychologiques »


2. L’accompagnement personnalisé des parents


Dans son introduction à cette seconde partie, le rapport pointe l’utilité des PMI (Protection Maternelle et Infantile), ce qui me fait extrêmement plaisir lorsque l’on sait combien la plupart sont en difficultés ou en danger malgré leur utilité qui n’est plus à démontrer (le rapport de Michèle Peyron l’ayant fait récemment).


La situation actuelle d’information en anténatal y est analysée afin d’améliorer la prise en charge (propositions p 54) mais ce qui m’intéresse particulièrement concerne les recommandations pour les visites à domicile permettant des interventions individualisée et graduée (puéricultrices de PMI mentionnées) p56.

Une des propositions parle de « visiteur de santé » pour les sages-femmes, éducateurs, médecins, assistantes sociales et…infirmières puéricultrices ! (p57).

Le rapport prend le temps de définir et présenter la possibilité de ressources spécifiques et d’accompagnement à la parentalité (p61).

Mentionner l’épuisement parental me semble également essentiel pour éviter de le nier et mieux le prévenir et l’accompagner (p63).


3. Répondre aux besoins des enfants spécifiques et fragilisés


La prématurité occupe une place non négligeable dans ce rapport (p68-71).

Elle y est redéfinie, expliquée et les conséquences y sont évoquées.

La commission souligne la nécessité de former les équipes de PMI (mais j’y aurai ajouté les médecins et paramédicaux de façon générale) aux problématiques des enfants prématurés quelque soit le terme (les 34-37 SA ne sont pas oubliés, ce qui est primordial !)


Les soins de développement centrés sur la famille sont mis en avant et détaillé avec le rapprochement parents-enfants dès que possible, 24h/24, les installations nécessaires pour cela, les recommandations sur l’environnement moins stressant, le soutien à l’allaitement et son accompagnement lors de la sortie (Youpi !!!!) ainsi que le soutien postural et la pratique du peau à peau.

Un ajout est également fait pour préciser la nécessité d’un nombre de personnel suffisant dans les services pour permettre l’élaboration de ces préconisations.


Les difficultés de délai de prise en charge par les CAMSP (Centre d’Action Médico-Sociale Précoce) sont également évoquées ainsi que le non remboursement de certains professionnels non conventionnés (orthophoniste, psychomotricien.ne, psychologue…) (p71).

Le dépistage et l’inclusion des enfants montrant des anomalies de la trajectoire neuro-développementale et donc le handicap à différents niveaux est également détaillé et permet l’élaboration de plusieurs recommandations qui me semblent cohérentes mais dont mes connaissances sur le terrain ne me permettent pas de juger correctement dans le détail (p72-76).


Le développement sur plusieurs pages concernant la dépression post-partum et parfois les troubles psychiatriques qui peuvent survenir (p77-82) permettent de légitimer cette réalité du terrain, très souvent sous-estimée, peu ou mal prise en charge et qui laissent beaucoup de parents dans le désarroi et la souffrance.


De la même manière, il était indispensable de se pencher sur les situations de violences conjugales et familiale (p83-85) auxquelles tous les professionnels de terrain sont confrontés malheureusement très régulièrement…


J’apprécie aussi le chapitre concernant les parents en situation de handicap (p 86) et celui sur les familles en grande précarité (p87), toujours pour les mêmes raisons.

Ce sont rarement des sujets abordés lorsque l’on parle grossesse et naissance et pourtant il fait partie de notre quotidien de soignant…


4. Les congés de naissance et les structures d’accueil


« Donner le temps nécessaire aux parents » (p90).

Un de mes chevaux de bataille…


Je suis donc tout à fait en accord et séduite par les pages qui suivent (p90-104) concernant les congés de naissance beaucoup trop court et n’incluant pas assez l’autre parent en France.

C’est d’ailleurs, il me semble, le thème qui représente plus gros chapitre du rapport et c’est tant mieux !

Parce qu’après la nécessité de comprendre son enfant, il faut pouvoir être présent à ses côtés !

Je suis également très heureuse du terme second parent employé et ajouté à celui de papa, qui permet d’objectiver la réalité du terrain et n’oublier personne…

Si vous devez prendre le temps de lire en détail un chapitre, choisissez celui-ci !


Explications de ce qui existe en France et de pourquoi il faut le réformer (p 90), de ce qui se fait ailleurs (sacrée différence…), du fait que les autres pays ne sont pas revenus en arrière après avoir fait ce choix.

Puis détails de l’importance de l’instauration de ces relations précoces (p 96), de la place du père ou du second parent (p 100) et comment cela intervient de façon plus large au niveau de la coparentalité mais aussi d’un partage équitable du travail et de la vie de famille entre parents (p 101) et plus largement de la promotion de l’égalité entre femmes et hommes (p 102) (Re Youpi !!!!).


Et malgré tout ça, j’apprécie la nuance de la commission sur le fait que ces congés restent un choix familial et personnel (p 103).

La partie concernant le système d’accueil était évidemment nécessaire (p 105 -115).

N’y travaillant pas, j’y retient essentiellement le focus mis sur la nécessité d’un accueil de qualité dans le respect de l’égalité des chances (p 113) et surtout sur la nécessité d’un ratio de 5 enfants/ adulte tout âge confondu, avec au moins 70% de professionnels diplômés.

Les autres points détaillés ne sont pas moins importants mais font moins partie mon quotidien professionnel.


5. La recherche, l’évaluation des pratiques et la formation des professionnels


Chapitre indispensable pour permettre de faire évoluer, réactualiser, mettre en place et améliorer tout ce qui a été décrit précédemment ! (p 117-125)



J’espère vous avoir proposé un résumé le plus objectif possible et proche du message que la commission souhaitait transmettre.

Les points qui m’enthousiasment n’engagent que moi et sont le reflet de ma pratique professionnelle et de mon vécu propre.

Chacun est spécialiste dans son domaine et ne voit pas forcément les manquements ailleurs…




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